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Une ville doit agir de bonne foi et ne peut jouer double-jeu

Un jugement concernant l’attribution des contrats de neige par la ville de Montréal, entre les années 2018 et 2020, a été rendu récemment par M. le juge Stéphane Lacoste, de la Cour supérieure du Québec.



La demanderesse est la compagnie 9150-2732 Québec Inc. Cette dernière qui a remporté deux appels d’offres successifs pour le même contrat n’a pas obtenu de fournir ses services dans certains districts de la ville qui étaient néanmoins inclus dans le document d’appel d’offres puisque la Ville de Montréal a négocié parallèlement un contrat de gré à gré avec une compagnie concurrente, avant de procéder à l’annulation de son appel d’offres.


La prétention de la ville s’appuie sur l’article 573.3 de la Loi sur les cités et villes qui, selon elle, lui donne le droit dans certaines circonstances de négocier exceptionnellement avec un tiers de gré à gré, sans pour autant avoir procédé préalablement à l’annulation de son appel d’offres antérieurement.


Le Tribunal tranche en faveur de la compagnie l’Entrepreneur et estime que la ville de Montréal ne peut négocier de gré à gré alors que : « l’appel d’offres est toujours « vivant » ». Le juge s’exprime ainsi:

[42] Elle a aussi raison de plaider que ce droit ne peut toutefois pas être exercé en parallèle d’un appel d’offres, encore moins après l’ouverture des soumissions alors qu’un contrat sui generis lie alors les soumissionnaires à Montréal. […]

La Ville prétend avoir agi conformément à ce principe, mais elle prétend avoir le droit de négocier de gré à gré dans les cas permis à l’article 573.3 L.c.v. et est d’avis que les règles lui permettent de laisser les compagnies soumissionner aux appels d’offres tout en négociant de gré à gré en parallèle, malgré la présence d’une clause de réserve prévue au document d’appel d’offres.


Le Tribunal estime que ces méthodes ne peuvent être combinées :


[50] Le Tribunal estime que le l’intention du législateur est de permettre à une municipalité de choisir l’une ou l’autre des deux voies : l’appel d’offres, ou la négociation de gré à gré. Elle n’est pas de permettre à une municipalité d’utiliser la première pour ensuite changer d’idée et négocier de gré à gré avec un tiers.
[57] Dans l’arrêt M.J.B. Entreprises Ltd c. Construction de défense (1951) Ltée, la Cour Suprême écrit d’ailleurs qu’« une clause de réserve ne permet ni le marchandisage de soumissions, ni les procédés qui s’y apparentent ». C’est justement ce que Montréal fait.

Le juge indique que la quantification des dommages est problématique, mais qu’il est évident que la ville a commis une faute et que l’Entrepreneur doit être dédommagé pour les soumissions qu’il a présentées et pour lesquelles il a fort probablement négligé d’autres contrats potentiels. Le juge s’exprime ainsi:


[65] Un soumissionnaire engage des dépenses lorsqu’il prépare et présente une soumission et s’empêche de s’engager dans d’autres contrats ou de déposer d’autres soumissions qui l’empêcheraient de respecter son contrat A avec la municipalité. Dans le cas de TMS, la preuve révèle qu’elle est réellement empêchée de déposer d’autres soumissions en réponse à d’autres appels d’offres contemporains.

Conclusion

Le juge condamne donc la ville de Montréal à verser à l’Entrepreneur la somme de 1 989 397,99 $ pour les années 2018-2019, 2019-2020 et 2020-2021 avec les intérêts et l’indemnité supplémentaire. C’est un excellent résultat obtenu par Me Eric Oliver de notre cabinet, qui a représenté, avec beaucoup de succès ce client.

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